CHRONIQUES SEDANAISES VI
- Thomas Delage

- il y a 1 jour
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Manifeste pour un Musée sur l’histoire du football sedanais

« Le futur est un présent du passé », André Malraux
Après « L’appel au camion Lucien » du printemps 2025, je lance solennement « l’Appel au Musée », soit une réflexion autour du tryptique musée/patrimoine/mémoire du football à Sedan.
Sommaire :
I) Prologue
II) Musées et patrimoines sportifs :
III) Un Musée du football à Sedan, d'un circuit mémoriel à un centre d'interprétation?
IV) Echanges avec Claude Lambert
I) Prologue :
Le Musée prend son sens actuel à partir de la Renaissance italienne (et les collections des Médicis, à Florence, au XVème siècle) et de la Révolution française (avec son Musée des Monuments français, en 1793, que Jules Michelet identifiait à une résurrection du passé).
Le Musée - du latin museum, lui-même emprunté au grec mouseîon - se veut être le lieu d’un récit collectif, une narration des origines quand la nation commence « à prendre conscience d’elle-même comme Nation » (Pierre Nora) à partir de collections d’œuvres exposées au public.
Le mot « patrimoine » vient du nom latin patrimonium ce qui signifie « l’héritage du père », désignant ainsi l’ensemble des biens légués par les générations précédentes, et qui doivent être transmises aux générations futures.
L’utilisation du mot patrimoine est assez récente, remontant à la décennie 1970, substituant peu à peu l’expression plus courante des « monuments historiques ».
L’importance de conserver des objets et édifices du passé, ainsi que de mener leur inventaire est toutefois plus ancienne. Victor Hugo entendait déjà mener la « Guerre aux démolisseurs » devant des actes de vandalisme (Revue des Deux Mondes, 1825).
Enfin il convient de distinguer l’étendue du patrimoine (son offre en terme de biens et d’archives du passé) de sa profondeur, qui renvoie à sa mémoire, à un récit collectif (ou identitaire) sans distance critique où comment les représentations du passé ont pu laisser des traces ainsi que l’évolution de leurs résonances. En la matière, Pierre Nora (qui a dirigé la collection Les Lieux de mémoire, entre 1984 et 1992) s’est appuyé sur les travaux de Maurice Halbwachs (La Mémoire collective, 1950).

3 tomes sur la République, la Nation et les France.
II) Musées et patrimoines sportifs :
La mise en valeur du patrimoine sportif (1), de l’histoire du sport, avec ses équipements, ses évènements, ses champions, remonte à la fin du XIXème siècle, certains clubs réunissent des objets anciens pour les présenter aux sociétaires et supporters.
Cependant la place de ce patrimoine sportif en tant que composante de la mémoire locale ou nationale, reste encore assez limitée.
Il est la plupart du temps le fait de l’initiative des clubs sportifs eux-mêmes, cherchant à exposer leurs trophées, maillots, fanions… dans leur stade, boutique, halls of fame (‘’galerie de la gloire’’ chez les Anglo-Saxons) ou club house.
D’abord exclusivement destiné à leurs adhérents, il s’ouvre progressivement vers tous les supporters et publics. Mêlant sport et culture, avec une orientation de plus en plus touristique, mais toujours autour de valeurs éducatives.
Le premier musée de sport est celui du club de cricket de Marylebone, en Angleterre, en 1865.Outre-Manche, le premier musée d’un club de football est celui de Manchester United (1984), puis du Liverpool FC (1997).

Le Musée de Manchester United, consacré au football, est le plus grand du monde. https://www.stadiumtour.fr
En France, la recherche académique et universitaire autour du sport en général, et du football en particulier (sur les clubs, sur l’évolution du jeu, sur le rôle de l’immigration, sur la mondialisation sportive…) a longtemps été secondaire, pour ne pas dire méprisée (2).
Les historiens Alfred Wahl et Pierre Lanfranchi font figure de précurseurs en la matière (3).

Dans l’Hexagone, le Musée National du Sport a quitté la capitale pour être désormais basé à Nice.Quant au Musée des Verts, il a ouvert ses portes à Saint-Etienne en 2013 pour retracer la légende et l’historique du club stéphanois.

Le premier Musée d’un club de foot français, celui de l’ASSE dans le Chaudron https://www.if-saint-etienne.fr/culture-loisirs
Un Musée du football ouvrier et de l’immigration, sous le haut patronage de Michel Platini et sous la direction de l’historien Théo Georget, est en préparation à Jœuf, en Lorraine. Les dimensions sociale et géographique du ‘’roi des sports’’ y seront également étudiées.

III) Un Musée du football à Sedan ?

Un panorama des blasons sedanais entre 1950 et 2020, réalisé à l’occasion d’un article pour le site allezsedan.com (en juillet 2020).
Le club de football de Sedan qui est un club plus que centenaire (douze décennies de pratique du foot dans la cité de Turenne), n’a pas toujours eu un intérêt ou une conscience historique aiguisée sur son passé. Il n’a pratiquement pas conservé d’archives de ses époques glorieuses.
Celles – très anciennes, remontant à l’entre-deux-guerres, constituées par André Trubert – ont été détruites lors de la débâcle de 1940. De même lors des destructions des grande (en 2001) et petite (en 2003) tribunes de l’ancien stade où des documents ont été réduits en poussière…
La relation du club avec son histoire s’est principalement bornée aux grandes heures de gloire de l’UAST. D’ailleurs les commémorations organisées par les différentes directions exécutives se sont souvent limitées aux victoires en Coupe de France ou à l’anniversaire décennal du club.On peut aussi regretter l’absence d’associations d’anciens joueurs qui pourraient véhiculer une image, une expérience, des valeurs et des symboles forts auprès des jeunes générations.
Or, depuis une vingtaine d’années (déjà !), c’est le grand projet du collectionneur et fervent supporter Claude Lambert (4).
Une association fut même créée par une dizaine de bénévoles en 2007 (le Vestiaire carolo. Mémoire du sport ardennais) avec l’idée plus large d’un musée qui engloberait l’ensemble du sport ardennais (le football sedanais y tenant une place prépondérante).
Pour de multiples raisons, ce projet a avorté plusieurs fois.
Précisons que le Musée Municipal de Sedan a vu le jour dès 1879 !
Quelle forme pourrait prendre ce projet muséal dans l’actuelle séquence que certains fans nomment « la reconstruction du CSSA », amorcée depuis l’été 2023 ?
1) La mise en place d’un circuit mémoriel sur le football avec un chemin permettant de déambuler dans la ville de Sedan serait intéressant ! Voici un possible parcours (5):
-> Le départ de cet itinéraire mémoriel serait évidemment les colonnes d’Albeau, fièrement dressées à l’entrée de l’ancien stade depuis les années 1930. Espérons qu’elles connaitront une restauration quand sera terminé l’aménagement du site (d’ici à 2027).

Le stade du Bourrelet est devenu le stade Emile Albeau en 1936. Seules les colonnes ont échappé à la destruction totale de l’ancien temple sportif sedanais !

(Photo DR, décembre 2024)
-> Remontons l’avenue Philippoteaux, en direction du collège Turenne, place d’Alsace-Lorraine, où la pratique du ‘’Foot-Ball’’ commença dès la fin du XIXème siècle avec l’association scolaire multi-sports de l’Union Athlétique du collège Turenne (U.A.C.T.).

De nombreux jeunes collégiens de Turenne disputèrent des rencontres informelles dans la cour de l’école, avant de jouer dans les multiples associations sedanaises de ‘’Foot-Ball’’ qui se succédèrent dans les premières années du XXème siècle.
-> Poursuivons cette découverte des « lieux originels » en prenant la direction de la prairie de Torcy où les jeunes apprentis tapaient le ballon à la Belle Epoque, au début du XXème siècle.

Les arches du viaduc servaient de vestiaires improvisés pour les pionniers du ballon rond.
-> Non loin de là, l’imposant château-fort de Sedan mérite également qu’on y fasse une halte. L’immense bâtisse du XVème siècle qui fit la fierté de la Principauté de Sedan, fut l’œuvre de la famille La Marck.
Ce que l’on sait moins, c’est qu’on y joua au football sur ses abords… ... bien après le Moyen-Age !

En 1903, une équipe de jeunes du quartier (composée essentiellement d’externes du collège Turenne) se forma, et prit le nom de « l’équipe de la place du château ». Sans le moindre équipement sportif, on peut imaginer qu’ils tapaient dans le ballon, au pied des remparts, au milieu du jardin des prêtes, qui servait de ‘’promenoir’’ aux religieux, présents pour la Cure de Sedan. Ils habitaient une vaste demeure dans la toute proche rue du Ménil, qui pour l’anecdote accueillit l’un des premiers jeux de Paume au XVIème siècle !

-> Un passage obligé serait de s’arrêter sur les lieux des anciens cafés sedanais qui ont été des salles de réunion et de fondation pour les premiers clubs locaux :
_ Le café du théâtre
_ Le café Richoux
_ Le café de la Poste
_ Le Sporting Bar

Sur la place du Rivage, le café du théâtre (sur la gauche de la rotonde) fut le premier siège social du ‘’Football Club Sedanais’’ (F.C.S.), autour de Messieurs Cardinal et Julien, respectivement président et vice-président, fondé le mercredi 13 mars 1901, point de départ de l’histoire du football à Sedan !


Un siècle plus tard, se trouve une banque, dans un bel immeuble de style Art déco qui a remplacé le théâtre, incendié en 1922.

Sur la même place du Rivage (aujourd’hui place Goulden), c’est au café Richoux, que l’Union Athlétique Sedanaise (U.A.S) tint sa première réunion, comme assemblée générale, le 7 novembre 1919 avec Marcel Schmitt, professeur de français au collège Turenne, et président de l’ancien Racing Club Sedanais (R.C.S.).
(Quelques jours plus tôt, le dimanche 2 novembre 1919, le Comité des Ardennes de Football avait enregistré l’affiliation de la nouvelle entité sportive, date qui est d’ailleurs toujours officiellement retenue par l’actuel CSSA comme acte de naissance)
(Photo éditée dans l’ouvrage « Le commerce sedanais au fil du temps» (2001).

Le café Pierre fut le siège social de la toute jeune U.A.S. dans les années 1920, rue de la Poste (qui s’appelait auparavant rue des Fours, détruite lors des bombardements de mai 1940, et reconstruite en 1958, dorénavant rue de la République).

L’équipe sedanaise est photographiée devant le café Pierre en 1922
(André Trubert est au deuxième rang, accroupi sur la gauche).

De nos jours, le Sporting Bar – du fait de sa proximité avec le stade Dugauguez - est un incontournable point de rendez-vous des supporters avant et après les rencontres du CSSA.
-> L’itinéraire du souvenir pourrait également passer par des « lieux festifs », comme la gare de Sedan, point de ralliement et de départ des supporters vers la capitale lors des cinq finales de Coupes de France disputées par les Sangliers.

Les supporters de l’UAST – en costume/cravate à l’époque pour se rendre sur Paris - se trouvent sur le quai de la gare en 1961, prêts pour aller affronter les Nîmois au stade de Colombes.

La gare de Sedan est parée des couleurs du CSSA en juin 2005 pour la dernière finale de Coupe disputée à ce jour contre Auxerre.
-> Itou pour la mairie de Sedan, place Turenne, où les équipes sedanaises furent officiellement reçues après des triomphes glorieux - Et pas seulement pour Dame Coupe ! – mais aussi pour des moments plus dramatiques (comme lors des réunions de crise pour sauver le club).

En juin 1991, dans le grand salon de l’hôtel de ville, le maire de Sedan, Michel Pochet (à droite de Francis Roumy avec le trophée du Champion de France de D3) félicite toute l’équipe du CSSA.

Le 5 juin 2005, toute l’équipe est reçue par le premier édile, Dominique Billaudelle, et ce malgré la cruelle défaite en finale à l’ultime minute de jeu. Les joueurs sont ovationnés sur le balcon !
-> Concernant les « lieux de vie » incontournables de l’histoire footballistique sedanaise, les Draperies Sedanaises, rue Jean-Jaurès, permettraient de rappeler l’âge d’or du football ouvrier du temps de l’Union Athlétique de Sedan-Torcy (U.A.S.T.) des frères Laurant.

L’entrée principale des Draperies Sedanaises, en 1952, au temps de leur splendeur, et des footballeurs-ouvriers des Trente Glorieuses.
-> Plus proche de notre présent mais hors Sedan (à Bazeilles), le Centre de vie Michel Charlot (2001 – 2023) évoquerait les années fastes du C.S.S.A de Pascal Urano, au tournant du nouveau millénaire. Ce centre d’entrainement et de formation symbolisa à la fois la rapide croissance du club et sa démesure par rapport au foot-business.

Le château de Montvillers (ici en 2017) - bâti au XVIIIème siècle - fut un éphémère restaurant gastronomique, implanté au cœur du projet de développement du CSSA des années 2000.
-> En revenant sur Sedan, afin de se rapprocher du stade, un petit détour pourrait s’imposer vers l’esplanade du Lac, à la salle omnisports Marcel Schmitt, en souvenir du père fondateur de l’Union Athlétique Sedanaise (U.A.S.).

Un panneau discret mentionne le père et l’inventeur de « SEDAN » en 1919.
-> Un moment plus solennel serait nécessaire sur la route du stade avec un passage par le cimetière sedanais. Un instant de recueillement sur la tombe d’Emile Albeau permettrait de remémorer le rôle de l’architecte-paysagiste et maire de Sedan (1929-1935) dans la vie locale du premier tiers du XXème siècle.

Emile Eugène Albeau (1862 – 1935)

-> Enfin ce circuit de la mémoire sedanaise se terminerait sur le site d’Albeau sur lequel les stades Jean Stackler (1919 -1924), du Bourrelet (1924 – 1936), le vélodrome (1933 – 1993), Emile Albeau (1936 – 2000), Louis-Dugauguez (depuis 2000) ont vu se succéder des milliers de matches de football avec autant d’émotions diverses et variées…

Un demi-siècle sépare ces deux photographies de l’épicentre du football sedanais
(En haut, de gauche à droite : Le crassier, le stade Emile Albeau et le vélodrome ;
Ci-dessous, le stade Louis Dugauguez)

D’ailleurs, le retour de l’Ecole de football de Sedan au sein même de l’ancienne Principauté a entrainé les débuts de la construction d’un nouveau centre d’entrainement depuis l’été 2025.

Albeau renait de ses cendres (Photo DR du 4/10/2025).
Ce pourrait être l’occasion de rénover les colonnes d’Albeau, vestige d’un passé mythique qui s’éloigne inexorablement, de mettre en valeur l’esplanade de Dugauguez avec une ou des statues de joueurs – façon Woinic - et enfin nommer les quatre tribunes du stade.
Préserver l’héritage de « nos chers Sedanais » (dixit Yanny Hureaux dans sa Beuquette quotidienne) est fondamental : Lors de son arrivée au club en tant que nouveau propriétaire (été 2024), Kalidou Koulibaly a indiqué souhaiter « garder cet état d’esprit ardennais » :
Faire visiter un futur Musée par les (nouveaux) joueurs serait un moyen de se l’approprier.
Proposer de visionner le film Ardents Sedanais, co-réalisé par Olivier Hennegrave et Patrick Charlot (1999) permettrait à de nouveaux joueurs de s’imprégner de l’ambiance ardennaise.

Ce film de 52 minutes a été réalisé à l’occasion des 80 ans du club, en novembre 1999.
2) Le second projet autour de l’histoire du club pourrait être celui d’un Musée ou plus exactement d’un Centre d’interprétation :
Autour de l’impressionnante collection personnelle de Claude Lambert (commencée dans les années 1960, et dépassant largement les 30 000 journaux), un fonds documentaire digne des Archives départementales, pourrait être constitué au stade, et ce dans un but pédagogique.
Par exemple, la collection unique de l’ensemble des magazines « Vert et Rouge » (1954 – 2018) pourrait faire l’objet d’une numérisation intégrale. Cette littérature sedanaise est précieuse pour replonger dans le passé de la vie quotidienne du club.

Le premier numéro de « Vert et Rouge », ‘’le lien des amis de l’UAST’’, est sorti le 29 aout 1954. Il a existé pendant plusieurs décennies. Sa dernière publication date de 2018.
Toute la presse locale, qui était très riche et dense au siècle dernier, aurait toute sa place dans les collections du Musée : Les titres de journaux étaient alors nombreux : Le Petit Ardennais, L’Echo des Ardennes, La Dépêche des Ardennes, Le Cri de Sedan, Sedan Républicain, Le Journal des Ardennes et du Nord-Est… pour n’en citer que quelqu’un ! (6) En scrutant dedans, nous retrouverions des bribes de matches, des anecdotes d’un autre temps !

Une de « L’Union », 28/05/1956

Une de « L’Ardennais », 8/05/1961.
Sans oublier la presse sportive et spécialisée qui était également plus abondante qu’aujourd’hui : L’Equipe, France-Football, Miroir Sprint, But !, Le Miroir des Sports, Football Magazine, Miroir du Football, Onze Mondial…

Une « France-Football », 6/02/1951.

Le derby Sedan/Reims à la Une du « Le Miroir des Sports », 12/09/1955.

Une de « L’Equipe », 30/01/1958.

Une de « Miroir-Sprint » avec ce titre ‘’Sedan a conquis Paris’’, 2/10/1961.
De plus, des archives audiovisuelles seraient aussi consultables, pour rendre plus vivant les épopées sedanaises.
Les sources radiophoniques et vidéos sont très diverses (radios locales, télé régionale avec FR3, nationale avec l’INA, et dorénavant numérique).
Recueillir des témoignages de joueurs, de dirigeants, de supporters, d’acteurs du club pourraient aussi être une mission de ce centre d’interprétation.
Des conférences et des expositions pourraient s’y tenir, et amenaient à débattre autour des passions et des problématiques du sport.
Etablir des statistiques précises et vérifiées : Par exemple, l’ensemble des résultats du club – saison après saison - de ses classements, de ses différents buteurs seraient consultables à foison.
Croiser l’histoire des clubs sedanais avec la grande Histoire rappellerait qu’un club n’est pas déconnecté des enjeux de son époque (de la défaite de 1870 à… Sedan qui provoqua l’émergence du sport dans les écoles aux guerres mondiales (7), en passant par la Belle Epoque, l’entre-deux-guerres, les Trente Glorieuses, la désindustrialisation si déchirante dans les Ardennes jusqu’à notre nouveau siècle).
La partie « Musée » serait mise en valeur par d‘innombrables objets du quotidien qui pourraient être enrichis par des legs et des dons de supporters au gré de la vie des fans des verts et rouges : L’existence de ce lieu mémoriel faciliterait et centraliserait les donations des partisans du CSSA. Des vieux ballons, des maillots, des fanions, des drapeaux, des posters, des photos, des trophées, des reliques de l’ancien stade… jusqu’à l’indémodable Smart Collection des années 2000.

A l’entrée d’un futur Musée, la Smart vert et rouge aurait toute sa place ! (avec Nicolas Sachy ?)
A travers une série de panneaux, l’évolution des sites sportifs serait retracée.
Une galerie de portraits des « Géants de Sedan » (dixit Marc Barreaud) verraient le jour pour (re)découvrir les footballeurs ayant marqué de leurs empreintes le football ardennais.

Affiche éditée lors de la publication de l’ouvrage des cinquante ‘’Géants’’ de Sedan, en 2000.
-> Une chronologie plus approfondie que celle actuellement proposée serait affichée. Ce renouvellement historiographique s’effectuerait avec une possible périodisation à l’image de l’Histoire :
_ Les origines du football à Sedan à travers les multiples clubs amateurs (De manière non exhaustive, le Football Club Sedanais, le Sedan Cricket Club, les Hirondelles Sedanaises, le Racing Club Sedanais, le Stade Sedanais…) de la Belle Epoque (1901-1914).
_ La Préhistoire du football sedanais, avec l’U.A.S et l’U.A.S.T., évoluant en championnat départemental et en Promotion (1919 – 1939).
_ L’Antiquité du football sedanais : Cette histoire ancienne correspond à l’âge d’or de Sedan avec sa fantastique ascension jusqu’au sommet du football français (1946 – 1974).
_ Le Moyen-Age du football sedanais avec le déclin du CSSA et une longue parenthèse ou traversée du désert (1974 – 1995).
_ Les Temps modernes du CSSA avec sa Renaissance en 1999 et sa Révolution au niveau des infrastructures et de son organisation (1995 – 2013).
_ La ‘’Décennie perdue’’ sous la présidence Dubois (2013 – 2023) malgré des débuts prometteurs.
_ Depuis 2023, « L’ère de la renaissance » (dixit le nouveau site officiel du club) a commencé avec la ‘’Reconstruction’’ contemporaine du club.

La chronologie telle qu’affichée au Club House du stade, mériterait d’être ‘’dépoussiérée’’ !
Ce Mémorial sedanais aurait donc l’objectif d’enseigner l’histoire du club, de diffuser son état d’esprit à part aux plus jeunes, de rendre plus lisible les archives aux supporters, et de regrouper les collections et autres donations des partisans sedanais.
Actuellement au stade, nous pouvons simplement observer :

Sans véritable mise en valeur, ni ordre précis, des posters de l’équipe première (remontant aux années 1980) sont accrochés dans la billetterie.

Dans la billetterie, une armoire aux trophées a été installée en toute urgence, en aout 2023, lors du déménagement express des affaires du CSSA depuis Bazeilles.

Lors de la réception de Chaumont (31/08/2025), le maire de Sedan, Didier Herbillon, a remis au président Guérin, des répliques miniatures des deux Coupes de France remportées.

A compter de 2003, et à l’initiative de Serge Marchetti (ancien directeur des organisations des matches), les loges VIP du stade regorgent de photos agrandies, plus ou moins anciennes du club.


Quant au salon présidentiel, les murs sont ornés d’anciens fanions ou de maillots collector (dont celui de Claude Brény, maillot rouge finale 1956 !)

3) Enfin, établir et proposer une bibliographie du football sedanais, en lien avec la riche et abondante presse ardennaise du XXème siècle, pour parfaire et approfondir ses connaissances sur l’histoire de Sedan :
Ci-dessous, une liste (loin, très loin d’être exhaustive) :
J’ai choisi un auteur par décennie :

L’introuvable ouvrage d’André Berger, Les Sports en Ardennes (période d’avant-guerre, 1918, 64p.), revient sur tous les résultats et classements du ‘’Football-association’’ avant la Grande Guerre.

Deux publications internes au club sedanais qui reviennent sur les débuts de l’épopée ainsi que sur les premiers exploits après la Libération (Il était une fois…Histoire de la brillante montée de l’équipe de football sedanaise, 1956, 42p; et Union Athlétique de Sedan-Torcy 1961-1962, 1961, 44p.)


Un rare et intéressant fascicule de Jean-Paul Valbonesi et Raymond Picchi, (Le Foot Ball Rugby dans les Ardennes, 1ère partie, 1968, 32 p.) qui parle surtout du ballon ovale !

La ‘’Bible du football sedanais’’ : Dans Le Défi de Sedan (D’abord paru sous la forme d’un feuilleton dans L’Ardennais en 1972, puis imprimé en 1982, et réédité en 1984, 166p.), le romancier et professeur d’histoire, Yanny Hureaux retrace l’aventure sedanaise de manière émouvante et romantique à travers la Revanche des Ardennes par l’intermédiaire de son club de football !

Déjà, en 1993, Claude Lambert avait proposé un ouvrage sur les différents sports ardennais (boxe, cyclisme, foot, basket… sans oublier le ‘’Sanglier des Ardennes’’, Roger Marche), annonciateur de son projet de musée dans Ardents Ardennais (159p.).

Lors du sacre de l’équipe de France, le journaliste Christian Vella retraçait le parcours biographique du plus illustre des joueurs sedanais (Roger Lemerre – Les Bleus au cœur, 2002, 238p.).

L’indispensable et précieuse encyclopédie du docteur en histoire, Marc Barreaud (déjà rédacteur d’un mémoire universitaire sur le club en 1986) avec l’ensemble des joueurs, entraineurs et dirigeants de Sedan depuis novembre 1919 ! (Dictionnaire des footballeurs sedanais, 2010, 328p.)

Où lorsque l’un des petit-fils de Lucien, Olivier Laurant raconte la saga familiale, la parfaite alchimie entre l’usine et le stade (Les frères Laurant, entre textile et football, un demi-siècle de passion sedanaise, 2015, 136p.)

En utilisant les coupures de presse de L’Ardennais et de L’Union, ainsi que les photos de Roger Vincent, le journaliste Jacques Bonfils revient sur le demi-siècle sedanais, entre grandeur et déclin, à travers son double Roman de Sedan (Les jours heureux 1950-1975, 2023 (2ème trimestre), 159p ; Les années de plomb 1975-2000, 2023 (4ème trimestre), 211p.)
IV) Echanges avec Claude Lambert, collectionneur, photographe et rédacteur:

En 1999, Claude Lambert avec le maillot d’Yves Herbert (finale de Coupe de France 1965)
_ Quel est ton plus grand souvenir avec ce club ?
En toute honnêteté il y en a plusieurs à commencer par mon premier match en nocturne à Emile-Albeau avec mes parents et mon frère : en avril 1957, j’avais 9 ans, un certain Sedan-Lens : 4-4. On ne peut non plus occulter la venue des Stéphanois à l’occasion de la remontée en Division 1 (mai 99, 3-0) ainsi que la demi-finale de coupe de France remportée face au Mans (avril 99, 4 -3). Et je dois en oublier… Chez les joueurs je citerai Ivica Osim, « le plus Grand » à mes yeux !
_ D’où te viens cette passion soudaine pour le club vert et rouge ?
Le déclic date certainement de cette opposition entre Sedanais et Lensois – le club chti est à vrai dire mon second club « de cœur » - et j’ai gardé en mémoire les maillots en satin rouge que portaient ceux que l’on surnommait « les Ardents Ardennais » ! Nous étions debout dans la grande tribune au milieu de supporters enthousiastes. J’ai coutume de dire que depuis il y a du sang… vert et rouge qui coule dans mes veines !
_ A quel moment as-tu commencé à t’intéresser à l’histoire du club ?
Disons dans les années 60 j’étais simple supporter m’intéressant surtout aux matchs. Et puis, au fil des saisons suivantes, en côtoyant notamment des fidèles d’Albeau qui malheureusement ne sont plus de ce monde, j’ai pris conscience que le club avait un riche passé. Grâce à eux je l’ai découvert, de par mes propres lectures, aussi des recherches enrichissantes et ma curiosité s’est bonifiée au fil des ans. En allant passer de nombreuses heures dans ce que l’on appelait alors « le grenier » du journal « L’Ardennais » j’ai pris moult notes que j’ai conservées précieusement.
_ Quand et pourquoi as-tu commencé à collectionner des objets et journaux sur le club sedanais ?
Précisément je ne saurais dire… Mon père avait aussi, dans d’autres domaines, ce petit pêché mignon qu’est de ne rien détruire mais, ce côté conservateur est aussi envahissant ! J’en connais dans ma famille qui peuvent en témoigner ! Outre les recherches, achats et rencontres avec des personnes résidant notamment dans les Ardennes, ainsi que bourses et brocantes, il y a eu beaucoup plus tard l’aide, si je puis dire, d’internet, cela est indéniable.
_ Quel est d’ailleurs ton objet de collection le plus précieux ?
Bonne question ! La plaque en fonte qui était à l’entrée du stade Emile Albeau ? Le maillot que Yves Herbet avait porté lors de finale de coupe de France Sedan-Rennes en mai 65 ou ceux de l’Equipe de France avec le fameux coq qui avaient aussi été la propriété d’Ardennais retenus alors parmi les Tricolores ? Pour moi, tous ces objets ont une valeur inestimable, surtout sentimentale. Jamais je ne m’en séparerai…

_ Quel serait ton rêve de collectionneur ? Ton Graal qui te manque dans ta « caverne d’Ali Baba » ?
Pourquoi pas le billet de la première finale de coupe de France contre Troyes en mai 56 ? Je connais quelqu’un qui le possède mais je comprends qu’il reste entre les mains de cette famille, l’un des siens, décédé, ayant été joueur, éducateur puis dirigeant à Sedan. Je l’ai vu ce billet, touché même mais ça n’a pas été plus loin…
_ Combien de journaux possèdes-tu ?
Allez, on arrondit, disons… 20.000 ! Un sacré stock qui n’est pas composé exclusivement de journaux relatifs au sport en général et au football en particulier. Oui, ça tient beaucoup de place, hein ?
_ Quel est le plus vieux journal en ta possession ?
« Le Petit Ardennais » fondé en 1880 par Emile Joseph Corneau industriel, maire de Charleville et député des Ardennes qui ensuite a été dirigé par son fils Georges Corneau. Installé au 36 cours Aristide Briand à Charleville, il changea de nom et devient « L’Ardennais » en septembre 1944. A l’époque, seulement deux pages, recto et verso !
_ Ton idée de créer un musée sur le football sedanais et le sport ardennais remonte déjà à une trentaine d’années ?
Eh oui et elle est toujours d’actualité et malheureusement non concrétisée jusque-là alors que j’espère le voir de mon vivant… En le créant, il permettrait aux plus anciens de revivre quelque peu un riche passé et aux plus jeunes de prendre conscience que le sport en général, dans mes chères Ardennes, dont le football a vécu des moments que je qualifierais bien volontiers d’historiques. Ce qui est dans le rétroviseur certes mais aussi le présent afin d’attirer par exemples des collégiens et des lycéens. Pourquoi pas des séances de dédicaces en même temps ?
Si tu avais carte blanche, comment imagines-tu ce Musée ? (dans sa conception, son organisation, sa localisation…).
Déjà dans un lieu de passage, c’est évident ! Une grande ville du département donc. Tout d’abord un coin lecture avec journaux et revues à disposition, puis objets divers et variés (fanions, photos, coupes, maillots, etc.) sous vitrine car toujours la crainte de tenter le diable chez certains visiteurs. Mais aussi renouveler fréquemment ce musée ce qui est possible car des personnes m’ont promis de me prêter ou donner « certaines choses » qu’ils possèdent actuellement. D’autres idées sont aussi les bienvenues… Elles intéresseraient les membres de l’association que j’ai créée : « Vestiaire carolo, mémoire du sport ardennais ».
_ Dernière question : De quand date la vraie création du tout premier club de football de Sedan ?
Sauf erreur de ma part il s’agit du « Football Club Sedanais » qui a vu le jour en 1899. Et puis ensuite il y a eu le « Criquet Club Sedanais » (en 1906), « L’Hirondelle « (en 1908), le « Racing Club Sedanais » (en 1913), etc. Des clubs que je n’ai pas connus… cela va de soi !
Reportage sur Claude Lambert (TV Ardennes, 21/04/2007)
Conclusion :
Dans l’actuelle phase de reconstruction (sportive, financière, numérique, par rapport aux infrastructures…), le volet muséal et culturel aurait toute sa place pour consolider l’ensemble du projet sedanais.
Afin de mieux saisir l’épaisseur du temps qui nous traverse, où pourrait se situer ce futur Musée ?
Au stade ?
Au Club House ?
A l’emplacement d’Albeau ?
Dans le musée municipal du Château-fort ?
Dans le futur Casino ?
Outre la sécurisation des locaux (sans tomber dans la paranoïa du Louvre), l’achat de vitrines serait nécessaire.
Le financement public de ce Musée pourrait venir des collectivités territoriales et nationales (Ville, Ardenne Métropole, Département, Région, ministère des Sports et de la Culture, voire l’UE). Certes les deniers publics sont précieux par les temps qui courent.
D’autre part un apport privé (partenariat et dons de supporters) serait aussi une autre piste.
C’est aux inconditionnels et fidèles supporters de notre cher CSSA de faire entendre et de porter cette nouvelle Alexandrie du foot !
Plus que jamais, allez SEDAN !
Thomas Delage (professeur d’histoire)
Notes :
1)
_ Christian Bromberger, « De la notion de patrimoine sportif » ; Pierre Chazaud, « La notion de patrimoine sportif. Regard historique et politique », Patrimoine sportif & tourisme, Les Cahiers Espaces, n°88, mai 2006.
_ Patrick Porte, « Muséographier le patrimoine sportif. Du musée de club à la cité du sport »; Claude Boli, « Le musée de Manchester United. Une réussite exemplaire » ; Stephen Done, « Le musée du Liverpool Football Club. Un lieu de pèlerinage pour les supporters », Musées du sport, Les Cahiers Espaces, n°89, mai 2006.
2)
Yann Dey-Helle, « L’éclosion tardive de l’histoire du football », in http://dialectik-football.info/, 22/04/2019.
3)
_ Alfred Wahl, Les archives du football. Sport et société en France (1890-1980), Collections archives, Editions Julliard, 1989, 158p.
_ B.B., « Historien : Pierre Lanfranchi », France-Football, 24/06/2005.
4)
_ Philippe Mellet, « ‘’Coups de cœur’’ ardennais », L’Ardennais, décembre 1993.
_ Jean-Yves Barzic, « L’infaillible mémoire de Claude Lambert », L’Ardennais, 9/05/1999.
_ « Petit musée », L’Ardennais (rubrique ‘’Au creux de l’oreille’’), 19/03/2003.
_ Pascal Rémy, « Un musée du sport ardennais en gestation », L’Ardennais, 24/01/2007.
_ Anne Despagne et Valérie Coulet, « Le projet d’un musée dédié aux sports ardennais », L’Ardennais, 3/12/2014.
5)
Il a été proposé des visites guidées lors de l’été 2024 par la Maison du Patrimoine : « Saison 2024 : Culture et sport dans le Grand Est : Une histoire de foot, des années 1900 à nos jours, le Football club de Sedan se raconte au stade Louis Dugauguez ».
6)
Gérald Dardart, La presse ardennaise de la Révolution à nos jours, un combat pour une identité, médiathèque municipale de Sedan, 1995, 80p.
7)
Marc Barreaud, « Le football en temps de guerre : quelques destins ardennais (1939-1945), La Seconde Guerre mondiale dans les Ardennes. Ce qu’il faut retenir, Société d’histoire des Ardennes (SHA), 2ème trimestre 2024 (2p.).

Street Art dans les coursives de l’Aileron du stade Louis-Dugauguez (Young Boys – 2025)

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